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Автор Дени Дидро

Denis Diderot

Jacques le fataliste et son maître

NOTICE PRÉLIMINAIRE

Deux ans plus tard, l'Institut de France s'organisait. Un de ses premiers soins fut de s'occuper de dresser une sorte de bilan des richesses perdues de la littérature française. On s'inquiéta, entre autres choses, d'un chant de Ver-Vert intitulé l'Ouvroir, qu'on crut être entre les mains du prince Henri de Prusse. Ce prince, qui, après avoir montré qu'il était bon capitaine, dut se réfugier dans une demi-obscurité pour ne pas risquer de trop déplaire à Frédéric II, son frère, occupait noblement ses loisirs en cultivant les lettres, les arts et les sciences. Il était un des souscripteurs à la Correspondance de Grimm. Il s'intéressait particulièrement à Diderot. La lectrice de sa femme, Mme de Prémontval, dont il sera question dans le roman, avait pu lui en parler de visu. Ce n'est pas cependant par elle, comme l'a cru l'éditeur Brière, qu'il eut communication de Jacques le Fataliste, puisqu'elle était morte plusieurs années avant que ce livre fût écrit. Il en possédait une copie au même titre que la vingtaine d'autres personnes dont parle Mylius. Seulement, il ne se crut pas obligé à la tenir secrète, et, en réponse à la demande du chant de Ver-Vert qu'il n'avait pas, il offrit Jacques le Fataliste, qu'il avait.

Il reçut des remercîments, et on le pria de mettre à exécution cette louable intention. Il répondit par cette nouvelle lettre:

«J'ai reçu la lettre que vous m'avez adressée. L'Institut national ne me doit aucune reconnaissance pour le désir sincère que j'ai eu de lui prouver mon estime: l'empressement que j'aurais eu de lui envoyer le manuscrit qu'il désirait, s'il eût été en ma puissance, en est le garant. On ne peut pas rendre plus de justice aux grandes vues qui l'animent pour mieux diriger les connaissances de l'humanité.

«Je regrette la perte que fait la littérature de ne pouvoir jouir des œuvres complètes de Gresset, cet auteur ayant une réputation si justement méritée. J'ai fait remettre au citoyen Caillard, ministre plénipotentiaire de la République française, le manuscrit de Jacques le Fataliste. J'espère que l'Institut national en sera bientôt en possession. Je suis, avec les sentiments qui vous sont dus, votre affectionné,

«Henri. »